FOCUS BALCANI – Ingredients pour une nouvelle guerre des Balkans

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Progetto di ricerca CeSEM, FOCUS – Balcani, la storia in movimento: quali conseguenze per l’Europa?

La guerre d’Ukraine a un peu détourné des regards la question des Balkans. La situation des pays issus du démantèlement de la République Fédérative Socialiste de Yougoslavie, est pourtant toujours préoccupante, les opérations militaires américano-occidentales n’ayant pas apporté la paix et la prospérité comme prétendu pour els justifier mais la guerre et la pauvreté, alors que les antagonismes entre les ethnies et les religions sont toujours là et maintiennent l’instabilité. Les “conflits gelés” de l’ex Yougoslavie sont autant de bombes à retardement posées par les Occidentaux et qui ne demandent qu’à exploser. Certains s’y activent.

 

Si l’on consulte une carte, on voit que par leur situation géographique les Etats et entité issus de l’ex Yougoslavie que sont la Serbie, la Macédoine et la Republika Srpska, à quoi l’on doit aujourd’hui ajouter en dehors de cette dernière la Hongrie et la Grèce, forment une épine dans le dos des postes avancés de l’Otan que sont la Roumanie et la Bulgarie. Certes la Hongrie et la Grèce sont eux aussi des pays de l’Otan mais le président de la première entretient de bonnes relations avec Vladimir Poutine et la deuxième, avec aujourd’hui les problèmes qu’on lui connait, le seul pays de l’Otan à ne pas avoir participé aux bombardements de la Serbie en 1999, devrait lui aussi entretenir de bonnes relations avec la Russie. Il y a dans ce que l’on a appelé le “Corridor N°10”, entre la puszta hongroise et le port de Thessalonique, une partie faible dans le dispositif euro-atlantique, un vide que l’Occident chercher par tous les moyens à combler et qu’il lui faut demain déstabiliser ou neutraliser.

 

L’écartèlement serbe

Entre l’Est et l’Ouest. Entre la Russie et la “ZOA, Zone d’Occupation Américaine”, selon une expression reprise à Henri Gobard (1). La Serbie est elle-même à la fois libre et occupée. Libre parce que son peuple slave orthodoxe se sent proche d’une Russie dont elle partage l’écriture en cyrillique et un rejet majoritaire de l’Union Européenne et encore plus de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord. Les sondages effectués depuis les bombardements de l’OTAN le montrent sans équivoque. Occupée parce que la classe politique est majoritairement collaborationniste, que la presse est entièrement aux mains et du côté de l’Occident, enfin parce que les entreprises et les richesses du sous sol ont été rafflées par des sociétés occidentales ou des intérêts pétromonarchiques arabes.

Après la chute de Slobodan Milosevic, la démocratisation et la liberté de la presse et du commerce se sont traduits par la main mise américano-ocidentale sur le cheptel politicien, les médias écrits et audio-visuels ainsi que les ressources. Issu d’une scission organisée sur le dos des Radicaux par Washington et Londres, le principal parti au pouvoir (2) s’est fait élire sur une thématique patriote pour trahir ses promesses électorales. Le Parti progressiste serbe n’est pas différent de ces pur artis dits de centre droit qui occupent la scène politique dans leurs pays respectifs pour appliquer les mots d’ordres et les mesures dictés à Washington et à Bruxelles. Bien que la Serbie ne soit pas encore dans l’Union Européenne ni dans l’OTAN, elle se comporte comme un Etat la plupart du temps aligné sur cet Occident. La plupart du temps mais pas toujours, en fonction de ce qui vient d’être expliqué.

Pour les Occidentaux, l’alignement de l’Etat serbe sur leur politique est insuffisant et suscite même sur certains sujets leur irritation.

– Le manque d’enthousiasme à l’égard de ce qui est considéré dans les capitales occidentales comme un critère de démocratie et de droits de l’homme est constamment relevé et fait l’objet de critiques et remontrances : c’est le cas de l’entravement de la gay pride annuelle qui voit sa procession interdite ou limitée selon les années.

– Les bonnes relations bilatérales entre Belgrade et Moscou suscitent aussi l’ire des capitales occidentales. Par exemple la Serbie ne s’est pas alignée sur la politique de sanctions à l’encontre de la Russie pour la question de l’Ukraine.

– La présence du président Tomislav Nikolic à Moscou le 9 mai pour la célébration de la Victoire soviétique a fortement déplu à l’axe euro-atlantique.

– Comme la visite de Vladimir Poutine pour le 70 ème anniversaire de la libération de Belgrade, des manoeuvres militaires conjointes de l’Armée Serbe et de l’Armée Russe en Sirmie, la base de défense civile serbo-russe pour les situations d’urgences à Nis, non loin du Kossovo et de la Macédoine…

Ces bonnes relations avec la Russie doivent beaucoup à l’ambassadeur de Serbie à Moscou Slavenko Terzic, un ancien des comités de défense de Slobodan Milosevic. La politique du pouvoir serbe est considérée comme ambigue et susceptible de basculer du mauvais côté à la faveur d’un évènement important. Un responsable américain estimait il y a quelques temps que deux pays n’étaient pas sûrs : la Serbie et l’Ukraine. C’était avant le putch américain de février 2014.

La libération imprévue à l’automne de Vojislav Seselj par le Tribunal de La Haye pour des “raisons médicales” a fait dire à certains que les Américains voulaient de la sorte faire pression sur les têtes gouvernementales. Depuis son retour Seselj a multiplié les réunions publiques et manifestations de rue, récupérant ses partisans et ceux passés chez les transfuges. Il se murmure que les Américains songeraient à remplacer les pions. Affaiblir le parti au pouvoir et susciter avec d’autres une coalition “pro-occidentale” entrerait dans ce jeu.

Chaque année le 11 juillet la commémoration du “massacre” de Srebrenica provoque un grand tintouin médiatique qui permet de dire que les Serbes ont effectué le plus grand massacre en Europe depuis la deuxième guerre mondiale. Cette agitation a eu cette années un relief particulier. A l’Organisation des Nations Unies (ONU), le 8 juillet la Russie a posé son véto à une résolution de la Grande Bretagne évoquant un “génocide”. Nul doute que cette initiative intempestive condamnée par la Serbie n’entre dans les moyens de pression exercés contre un Etat qui n’est pas jugé suffisament docile. C’est une façon aussi de relancer l’agitation en attisant les haines.

 

Intrigues en Voïvodine et au Sandjak (Raska)

L’une des erreurs du Maréchal Tito a sans doute été d’accorder une large autonomie à la Voïvodine et au Kossovo. On sait ce qui s’est passé au Kossovo, on voit ce que certains essaient de faire en Voïvodine. Au nord de la Serbie, la province de Voïvodine intéresse les services occidentaux pour deux raisons : l’existence d’une vingtaine de minorités ethniques et un particularisme d’origine historique. La Vojvodine a fait partie de l’Empire Austro-Hongrois avant de se rattacher à la Serbie à l’issu de la première guerre mondiale. Pendant la deuxième guerre mondiale, elle fut occupée et découpée en trois morceaux : un district administré par la Hongrie (Backa), un district dévolu à la Croatie (Baranja), enfin une zone directement administrée par l’Allemagne (Banat).

Depuis janvier 2010 la Voïvodine a retrouvé une certaine autonomie mais d’aucuns veulent plus. Les tendances séparatistes affectent des éléments de la minorité hongroise, surtout dans la région de Subotica, mais aussi une catégorie de Serbes plus ou moins nostalgiques de l’Empire Austro-Hongrois et qui se croient supérieurs à ceux du Sud. On pense au syndrome de la Ligue du Nord de Bossi hier en Italie. La nouvelle présidente américano-croate Kolinda Grabar-Kitarovic, ancienne ambassadrice à Washington puis secrétaire général-adjointe de l’Otan, une amie de la secrétaire d’Etat adjointe états-unienne Victoria Nuland qui a beaucoup visité les Balkans ces derniers temps, a aussi des visées sur la province.

Mais la situation de la Voïvodine n’est en rien comparable à celle du Kossovo. Dans la province du nord, les Serbes loyaux sont largement majoritaires, la minorité la plus importante, la minorité hongroise ne représentant pas plus de 14% de la population. La plupart des autres minorités sont des minorités slaves vivant en bonne entente avec les Serbes, en particulier les Tchèques, les Slovaques et les Ruthènes de Vojvodine.

Il n’empêche que la Vojvodine est une cible des pays de l’Otan pour dépecer complètement la Serbie. Les Ong de Soros l’appellent abusivement le “Kossovo Hongrois”. C’est en Vojvodine, exactement à Banatski Dvor, que devait se trouver le réservoir souterrain du gazoduc South Stream, projet que la colonie bulgare a fait avorter sur ordre de l’Occident.

Evoquant le role des Ong étrangères, dans un article intitulé La Vojvodine, prochain pseudo-Etat en Europe? (3) l’américain Wayne Madsen note : “Les diverses agences de Soros et des néo-conservateurs sont hyperactives en Voïvodine. Elles comprennent la National Endowment for Democracy et l’Open Society Institute de Soros. Bojan Pajtić, le président du gouvernement provincial de Voïvodine, qui parle couramment hongrois et anglais, est à l’aise avec les cadres d’ONG financées par Soros et la CIA, qui collaborent étroitement avec le secrétaire d’État adjoint pour les Affaires européennes Victoria Nuland, la personne qui a conduit à la victoire Grabar-Kitarović en Croatie et qui est prête à provoquer une guerre pour l’indépendance de la Voïvodine avec la complicité des provocateurs professionnels récemment arrivés de Roumanie, de Hongrie, d’Albanie et des camps de Roms des Balkans.

Si l’Ukraine est en quoique ce soit un modèle, ce que Nuland et ses néo-conservateurs gardent en réserve pour la Voivodine nettoiera la province de ses Serbes et fournira un pays ami pour les compagnies pétrolières et gazières occidentales afin exploiter les réserves d’hydrocarbures existantes dans l’est de la Voïvodine, une région appelée Banat.”

Zone peuplée pour moitié de musulmans, à la ligne de démarcation avec le Kossovo et le Monténégro, le Sandjak, nom turc, que les Serbes appellent la Rascie (Raska), a pour capitale Novi Pazar. Encore marqué par le sceau ottoman, le Sandjak apparaît à certains comme un trait d’union entre le Kossovo arraché à la Serbie et la Bosnie et Herzégovine musulmane. Il est un relais de ce qu’on a appelé pendant la guerre yougoslave la “Diagonale Verte.” Comme ils l’avaient fait à Pristina alors que le Kossovo était encore sous administrations serbe, les Américains entretiennent à Novi Pazar un Centre Culturel qui n’est qu’une couverture pour leurs activités subversives. Au début des années 1990 c’est de Novi Pazar qu’étaient partis les premiers “bosniaques” qui firent le coup de feu contre les Serbes. Novi Pazar alimente un important foyer wahabbite. En cas de nouveau conflit dans les Balkans, il faudra surveiller cette région.

 

La Republika Srpska entre rattachement et effacement

On a pu constater encore une fois cette année à quel point le montage politico-médiatique de Srebrenica échauffait les esprits. Le 11 juillet le premier ministre serbe Alexandre Vucic a commis l’erreur d’assister à la cérémonie de Srebrenica. Il n’a échappé au lynchage que par la protection de ses gardes du corps. Le veto russe à la résolution britannique de l’Onu n’est sans doute pas étranger à l’incident que l’on dit à Belgrade suscité par les services de propagande de Londres via des éléments hostiles du Sandjak et du Kossovo.

L’an dernier les troubles dans la partie musulmane de la Bosnie et Herzégovine visaient en fait l’autre partie, la Republika Srpska (RS). L’existence de cette entité serbe, qui bénéficie de presque tous les attributs d’un Etat indépendant, gène en effet les Américains et leur communauté internationale. La fabrication de cet “Etat” par leur “nation building” a été un échec. L’Etat de Bosnie et Herzégovine n’existe que sur le papier. Les deux communautés principales, la musulmane et la serbe, vivent séparément. La zone musulmane, en crise, s’est vidée d’une partie de sa population (4), l’ économie est vacillante et la jeunesse désemparée par une absence de perspectives. L’émigration de la Fédération de Bosnie et Herzégovine (l’entité musulmane) s’est faite principalement en Allemagne et en Autriche. L’existence d’un noyau wahhabite hérité de la guerre attire fréquemment l’attention sur cette petite communauté qui se livre à un prosélytisme important. En avril dernier à Zvornik, une attaque contre un poste de police a tué un policier serbe de Bosnie. Un centre islamiste radical se trouve depuis la guerre dans le village de Gornja Maoca. Selon certaines sources, le village d’Ošve serait un nouveau centre de recrutement et d’action de l’Etat Islamique.

Le motif de l’ire américano-occidentale à l’encontre de Banja Luka (4) est le même que pour Belgrade, un alignement insuffisant sur l’Occident et un rapprochement du président de la Republique avec la Russie. L’an dernier, le Printemps Bosniaque avait pour véritable objectif, non point de déstabiliser la partie musulmane mais par ricochet la République des Serbes de Bosnie que les Occidentaux veulent faire rentrer dans le rang ou supprimer. Tout ce qui est un obstacle au plan global de l’Euro-Atlantisme doit être éliminé. Le président de la RS, Milorad Dodik, qui évoque souvent le rattachement à la Serbie, a eu le tort lui aussi d’assister aux cérémonies de commémoration du 9 mai à Moscou. Installé au pouvoir en 1998 comme président du gouvernement avec le soutien de Slobodan Milosevic (qui avait été à Dayton, une personne fréquentable), Milorad Dodik devait assurer la transition difficile de l’après Karadzic et, par manque de collaboration, perdre progressivement le soutien des Occidentaux.

Le Printemps Bosniaque faisait allusion au fameux Printemps Arabe qui, on le sait, a abouti à l’hiver dans le désert. La déstabilisation de la Tunisie et de l’Egypte, la prise du pouvoir par les Frères Musulmans avant qu’ils ne soient affaiblis en Tunisie et radicalement écartés du pouvoir en Egypte par un général qui s’est rapproché de la Russie. Mais le croisement des termes va plus loin. L’ambassadeur de Palestine en Bosnie et Herzégovine, Rezeq Namoora, pour se faire bien voir à Sarajevo, a comparé le territoire de Gaza à l’ex enclave de Srebrenica. (6) Une comparaison infondée mais qui devrait gêner Bernard Henri Lévy et plaire à Tariq Ramadan, faces de Janus d’une même pièce de théâtre états-unienne. Quand on sait que pendant la guerre l’homme que les Américains avaient hissé au pouvoir dans la partie musulmane de la Bosnie était le Frère Musulman Alija Izetbegovic et que c’est son fils Bakir qui conduit aujourd’hui la politique “bosniaque”. On sait que la direction politique de l’OLP est, comme la direction bosniaque, dans la poche des Américains…

 

La Macédoine en ligne de mire

Au sein du Corridor N° 10 la FYROM, nom involontaire de la Macédoine, présente la particularité d’être un pays particulièrement vulnérable. Encouragée par le précédent du Kossovo, sa minorité albanaise émet des revendications ethniques et territoriales dont l’aboutissement signifierait sa destruction. Depuis l’indépendance les 20 à 25% d’Albanais de cet Etat fragile emmettent des revendications de plus en plus importantes. Ils voulaient une Université albanaise, ils l’ont. A l’ouest d’une ligne allant de la ville de Kumanovo à Struga, en passant par Tetovo, Gostivar et Kisevo, les Albanais disposent presque partout d’un territoire ethnique où ils sont majoritaires. La proximité du Kossovo et de l’Albanie donne à ces revendications un aspect irrédentiste ou pan-albanais évident.

En août 2001, les accords d’Ohrid furent présentés comme un moyen de donner aux Albanais “une meilleure représentation dans le société macédonienne” . Le bilinguisme dans les municipalités, l’un des termes de l’accord, a été transformé dans les villes où ils sont majoritaires en moyen pour imposer la seule langue albanaise. Et avec la langue d’étendre leur pouvoir. C’est ainsi qu’en l’espace de cinq ans la ville de Struga, sur le lac d’Ohrid, est passée d’un équilibre ethno-linguistique précaire à l’hégémonie albanaise au détriment des Macédoniens.

La contestation du pouvoir en place se sert à la fois des revendications permanentes albanaises encouragées par Washington et Bruxelles et de l’ opposition social-démocrate soutenue par les mêmes. Bien que de nature et d’objectifs différents, leur conjonction ponctuelle permet une synergie dangereuse pour l’Etat.

Le 9 mai dernier, on a vu à la fois la contestation politique de rue à Skopje et un coup manqué dans la ville symbolique de Kumanovo. Dans cette dernière, des commandos armés formés d’albanais de Macédoine et du Kossovo devaient tenter un soulèvement ethnique tandis que non loin de là des éléments macédoniens tentaient le Maidan de Skopje. Les deux devaient échouer par l’énergique réaction des forces de l’ordre à Kumanovo et une grande manifestation du parti au pouvoir à Skopje qui succédait à celle de l’opposition la veille. Par cette manifestation qui devait rassembler près de 100.000 participants, le VRMO-DPMNE (7) du premier ministre Gruevski mettait un terme à la contestation de rue. Il apparaît toutefois évident que pour les protagonistes de l’opposition, ces deux tentatives avortées ne sont que partie remise. Il y aura d’autres tentatives.

Dans le cas de la Macédoine, la date de tentative de Maidan et de coup de force un 9 mai n’est pas innocente. L’un des rares présidents présents à Moscou ce jour-là n’était autre en effet que le président de la république, Gjorge Ivanov. Il devait écourter son séjour dans la capitale russe pour rentrer précipitament à Skopje.

Le VMRO-DPMNE n’est pas un parti spécialement nationaliste mais la bonne entente avec la Russie déplaît aux “ambassadeurs occidentaux” qui semble être les véritables animateurs de l’opposition. Se mêlant, comme partout dans les Balkans, de ce qui ne les regarde pas, les tuteurs veulent que la Macédoine entre le plus rapidement possible dans l’OTAN et se plie à leurs injonctions (droits démocratiques, anti-corruption et cetera). Ils sont pressés car l’attirance pour l’Ue et l’Otan a fondu. Elle est passée de 90% au moment de l’ “indépendance” à 50% aujourd’hui.

En visite à Strabourg après les évènements, le premier ministre macédonien devait concéder des élections pour avril prochain mais de nouveaux troubles sont fort possibles avant cette date. Le pouvoir macédonien est en effet favorable au nouveau projet russe de gazoduc qui doit passer par la Turquie et la Grèce. Ce projet remplace South Stream saboté sur ordre de Bruxelles et de Washington. Les Occidentaux feront tout pour saboter ce nouveau projet. Raison pour laquelle la Macédoine se trouve dans la ligne de mire. La façon la plus simple serait de secréter un gouvernement dans leur poche. Les Américains veulent un “regime change’. Des plans existent même pour faire éclater la FYROM (Macédoine). Une partie irait à l’Albanie, une autre partie à la Bulgarie. Ceci ne ferait pas l’affaire de la Serbie qui considère son ancienne province du Sud devenue République avec Tito puis Etat indépendant avec le démantèlement de la Yougoslavie comme une zone tampon neutre permettant un transit amical vers la Grèce.

 

Le Kossovo conflit gelé

Le terme de “conflit gelé” a été employé pour les entités de l’Abkhazie, de l’Ossétie du Sud, du Haut Karanagh et de la Transnistrie (Pridnestrovie). On sait ce qu’il est advenu des deux premières. Le Kossovo appartient lui aussi à la catégorie des conflits gelés même si le terme ne lui est pas accolé.

Comme en Bosnie musulmane, une partie de la population albanaise du Kossovo a fui l’entité, principalement vers l’Allemagne et l’Autriche, à la recherche d’une vie meilleure. C’est aussi un signe de l’échec des opérations états-uniennes et de leurs alliés : non seulement les entités fabriquées par le nation building ne sont pas viables mais encore une partie de la population cherche à fuir. Bien que minoritaires et subissant la menace et la précarité, les Serbes du Nord et des Enclaves ne fuient pas et s’accrochent au contraire à leur ancien berceau historique.

Une partie des terroristes de Kumanovo venaient du Kossovo, en particulier de la base américaine de Camp Bondsteel. Parmi eux, fait ignoré par la presse occidentale, on avait relevé la présence d’anglais et d’américains. Selon le journaliste macédonien Mile Nedelkovski quatre d’entre eux , qui faisaient partie du commando agresseur, ont été tués. Cette participation étrangère explique pourquoi les ambassadeurs des Etats-Unis et de Grande Bretagne avaient demandé aux autorités de Skopje d’arrêter l’opération antiterroriste et de permettre le retour au Kossovo de tout ce beau monde. C’est bien la preuve qu’il y a encore une fois un lien entre les activités subversives des Anglo-Américains et des groupes, qui tels les Albanais ou les Bosniaques, leur servent de masse de manoeuvre et assument la fonction géopolitique de perturbateur. Comme au Proche Orient, dans les Balkans les éléments les plus frustes et les moins éduqués servent les entreprises souterraines de l’Empire.

Dans un tel contexte héritier des fractures des récentes guerres balkaniques et des opérations militaires de l’oncle Sam et de ses alliés, on doit poser la question du rôle attribué à ceux que l’on appelle depuis peu les “migrants” et dont le flot envahit la Macédoine puis la Serbie à partir de la Grèce et de la Bulgarie. Ils cherchent, nous dit-on, à aller eux aussi en Allemagne, en France ou encore dans les pays nordiques. La question doit être posée de leur utilité dans les grandes manoeuvres en cours en ex Yougoslavie comme dans cette Europe qui prend l’eau. Car les fameux migrants apparaissent comme en majorité des hommes jeunes, décidés et capables de s’adapter aux situations les plus diverses. Ils disposent d’argent et de moyens de communication que n’ont pas les vrais réfugiés des zones de conflits. En quelque sorte, on semble avoir affaire, pour une partie d’entre eux, de combattants sous couverture de réfugiés des points chauds

Des centaines, des milliers de volontaires de Bosnie, du Kossovo, de Macédoine et du Sandjak (Raska) sont partis se battre en Syrie et en Irak du côté de l’Etat Islamique (ISIS) et des groupes assimilés. Ceux qui reviendront seront bons pour le service dans la région. Les spécialistes estiment qu’une partie des migrants sont des combattants islamistes

La Hongrie a bâti un mur à la frontière avec la Serbie pour empêcher ces derniers de pénétrer sur son territoire. Elle a aussi construit des camps. Si ces indésirables n’arrivent pas à passer en Hongrie, la Serbie deviendra un goulot d’étranglement avec toutes les conséquences imaginables. Car ni la Grèce ni la Macédoine ne sont en état de contrôler leurs frontières. D’ailleurs elles ne le souhaitent pas et veulent que les migrants quittent leur territoire. Entre Albanais et “réfugiés”, la solidarité musulmane joue. De la vallée de Presevo, dans le sud de la Serbie, au Sandjak (Rascie) en passant par le Kossovo et le Monténégro, quand ils ne sont pas enlevés et échangés contre rançon, les migrants reçoivent un bon accueil, aide et hébergement. On comprend ce que cela veut dire.

Demain on peut envisager : une disparition de la Macédoine, une récupération du Kossovo, le rattachement de la Republika Srpska à la Serbie, l’agrandissement de l’Albanie et de la Bulgarie. Avec la tentative de faire de la Voïvodine qui est, rappelons-le, une province majoritairement serbe, tous ces changements affecteraient encore plus la stabilité de la région et auraient des conséquences sanglantes, ce dont les Américains se fichent comme de colin tampon. Ils sont en Europe pour répandre le chaos.

Le 19 juillet, le président de l’Institut des Etudes Stratégiques Russe (RISS), déclarait au quotidien serbe Vecernje Novosti que les frontières dans les Balkans ont changé et qu’elles changeraient encore.

Selon Leonid Petrovitch Rechetnikov, la Serbie, la Republika Srpska et le Kossovo sont au centre d’un bras de fer entre Washington et Moscou. Il y a des agents américains au sein du gouvernement serbe, qui y font un travail de sape. Rechetnikov qui, en privé, conseille aux Serbes de se débarrasser de ces taupes, explique que si la Russie est avec la Serbie, elle continuera à la défendre si cette dernière se défend elle-même et que la meilleure défense, c’est l’attaque. Il met en garde contre une entrée dans l’Otan : Qui entrera dans l’Otan sera notre cible. Voilà les hésitants prévenus. Il ne faut accorder aucun crédit aux paroles occidentales. Quoi qu’elle fasse, la Serbie aura toujours tort parce qu’elle est considérée comme trop proche de la Russie. Evoquant l’entrée d’éléments de l’Etat Islamique dans la région, le directeur du RISS confirme que ce groupe a été fabriqué par les Américains mais ajoute qu’ils en ont perdu le contrôle. Washington a une fois de plus joué le rôle de l’apprenti sorcier. On avait déjà vu cela avec Ben Laden et Al-Qaeda.

Leonid Petrovitch Rechetnikov qui était dans un passé récent lieutenant-Général du SVR, le Service de Renseignement Extérieur de la Fédération de Russie, par définition un homme bien renseigné, et forcément en contact avec ses collègues en activité, est bien au courant des intrigues géopolitiques en cours. C’ est un analyste dont il faut peser tous les mots.

Yves Bataille

 

NOTE

(1) Henri Gobard, La Guerre Culturelle, Copernic, Paris 1979

(2) Parti progressiste serbe, le Sns a été fondé en 2008 alors que le chef du Parti radical dont étaient issus les actuels premier ministre et président se trouvait en prison en Hollande. Une scission organisée selon certains par les service secrets britanniques.

(3) La Voïvodine, prochain pseudo-Etat en Europe? , Wayne Madsen, 18 février 2015, Voltairenet.org et Strategic Culture Foundation (Russie).

(4) Depuis l’indépendance formelle, l’entité musulmane aurait perdu le tiers de sa population.

(5) La capitale de la Republika Srpska.

(6) S’il y a bien des “Palestiniens” en Europe, ce sont les Serbes en butte à persécution permanente, les Serbes dont les chefs les plus valeureux ont été emprisonnés ou tués à La Haye, les Serbes qui n’ont aucun droit sauf celui de se taire alors que d’autres ont tous les droits et on sait lesquels. La première ambassade de l’Organisation pour la Libération de la Palestine (OLP) en Europe a été ouverte à Belgrade en Serbie

(7) VMRO-DPMNE : Organisation révolutionnaire intérieure de la Macédoine – Parti démocratique pour l’unité nationale macédonienne.

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